9 octobre, nous allons à l’aéroport de Tontounta de Nouméa, Dany arrive et passera un mois avec nous. Nous commençons par une visite de la ville de Nouméa, quadrilatère parcouru par des artères se coupant à angle droit, la vieille ville n’a qu’un siècle. Au centre ville il y a la place des cocotiers composée de quatre quadrilatères chacun ayant un style différent, on y trouve des sentiers de briques roses, des plans d’eau avec fontaines, un agréable café qui va devenir pour nous deux notre rendez-vous du soir pour y déguster de très bonnes gaufres, et malgré son nom il y a peu de cocotier mais plutôt des Flamboyants et c’est le lieu de rencontre des Nouméens. Quelques baignades dans la rivière au sable rouge accompagnées de Sophie et Manon, ou à la plage de la baie des Citrons, bien abritée des vents dominants et bordée de sable pas très fin et de cocotiers. Nous fêtons l’anniversaire de Manon, 5 ans, elle a invité ses copines sur la plage, les gâteaux, les cadeaux, les bonbons et les copains des parents sont tous là.
N’ayant pas encore de voiture c’est en bus que nous allons faire nos virées, nous commençons par le parc forestier, aménagé dans l’une des dernières forêts préservées de la presqu’île de Nouméa, on peut y voir la plupart des espèces animales de l’archipel à commencer par le célèbre Cagou choisi comme emblème Calédonien. Nous y passons une journée entière tellement le lieu est agréable et tranquille.
Nous passons une journée entière aussi, au centre culturel Tjibaou, dernier des grands travaux entrepris sous l’ère Mittérand, c’est l’un des plus importants ensembles culturels du Pacifique Sud, son architecture est une synthèse réussie de la tradition mélanésienne. Composé de 10 grandes cases de bois et de verre le long d’une allée de pins colonnaires à la manière d’un village traditionnel. L’architecture est mise en valeur par un site exceptionnel entre lagon et lagune. Nous pouvons y découvrir les liens de la tradition mélanésienne avec la mer, la terre et les plantes en suivant un chemin kanak.
L’ambition du centre Tjibaou est de faire connaître la culture Kanak traditionnelle. Qui était Jean Marie Tjibaou ? Il était le maire de Hienghène, indépendantiste. En 1977 les partisans de la Nouvelle Calédonie française créent le rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR) longtemps dirigé par le gaulliste Jacques Lafleur. En 1981-1985, après l’élection de François Mittérand le parlement vote un nouveau statut, prévoyant une autonomie renforcée du territoire et la préparation du scrutin d’autodétermination dans un délai de 5 ans. Rejeté à la foi par les indépendantistes et les loyalistes (anti indépendantistes), le blocage débouche sur une grave crise d’où se crée le Front de libération nationale Kanak socialiste, dirigé par J.M. Tjibaou entre autre. En 1987 il y a un référendum en Calédonie 83% des votants se prononcent pour le maintien de la NC dans la république. Mais 94% des Kanak boycottent le vote. S’ensuivra en 1988 la prise d’otages de 27 gendarmes à Ouvéa dont 4 seront tués ainsi que 2 militaires et 19 Kanak. En juin 1988 à Paris, en présence de JM Tjibaou, J. Lafleur, Mittérand et Rocard, il sera signé l’accord de Matignon. En 1989 le 4 mai, lors de la cérémonie de levée de deuil des 19 morts Kanak d’Ouvéa (île Loyauté) J.M. Tjibaou et Yeiwéné les dirigeants du mouvement indépendantiste, sont assassinés par un extrémiste Kanak.
Notre première virée se fera en voiture, dans le sud avec Stéphane. Le tour du Mont Dore, les Deux Tétons et le lac artificiel de Yaté de 40 km², en longeant le lac on traverse la plaine du marais et son spectacle de couleur, la terre rouge et la couleur opaline de l’eau ainsi que quelques arbres qui nous montrent leur cime émergeant des eaux, au loin le barrage de Yaté construit en 1912 avec la main d’œuvre de Wallis et Tahiti.
Nous poursuivons par la route des crêtes, pas un arbre que de la terre rouge. Nous suivons la petite route qui longe le lagon jusqu’aux mines de fer de Goro ainsi qu’une zone d’extraction de Nickel plus loin. Baignade dans la cascade de Wadiana, pas très chaude l’eau mais elle est douce. Nous ferons un arrêt pique nique aux chutes de la Madeleine qui est aussi une réserve spéciale de flore. Retour par le col de la laverie, dit la Capture jusqu’au promontoir d’où nous avons une vue sur toute la baie de Prony, nous irons jusqu’au ponton d’accès qui permet aux touristes d’embarquer sur des voiliers qui les mèneront voir les baleines à bosse, c’est un lieu priviligié pour elles que cette baie, en face nous voyons l’île Ouen. Nous rentrons à Nouméa par le col de Prony, traversée de la rivière bleue, la rivière des Pirogues et la boucle est bouclée, Nouméa et ses embouteillages quotidiens.
Nous allons passés une journée entière au Musée de Nouméa, consacré à l’ethnologie et à l’archéologie, au rez de chaussé dans la cour est édifiée une grande case, nous sommes avec une Mama qui nous apprend le tressage de l’Aloès, de sa récolte jusqu’au petit sac que nous sommes très fières d’emporter avec nous le soir. Superbe journée entre femmes de différents âges, dont je garde les contacts pour des journées prochaines.
Premier week end des vacances scolaires de la Toussaint, nous partons avec les filles, Sophie, Sébastien et Audrey, à Poé, à côté de Bourail, troisième fois pour nous. Le coin est magnifique, nous sommes dans un centre de vacances, dans une maison et ça nous fait tout drôle de dormir dans un lit, les pieds presque dans l’eau tout de même. Nous y resterons trois jours, hélas le temps n’est pas avec nous, le vent souffle très fort et la chaleur normale du mois de novembre est absente. Nous ferons néanmoins du canoë et des baignades. Retour sur Nouméa par le chemin des écoliers, Sophie nous faisant la guide touristique et la tournée des jolies petites baies.
3 novembre, Maoro quitte son mouillage tout content de bouger un peu, nous partons pour l’île des Pins. La navigation de nuit étant impossible, nous nous arrêtons dans une jolie baie de l’île Ouen, la baie de Gno. Cette première navigation pour Dany ne fut pas des plus plaisantes, nous avons fait du près en tirant des bords et sous les grains. Nous avons parcouru 36 milles depuis le départ à midi et il est 18 heures lorsque nous mouillons.
4 novembre, 9 heures, on relève le mouillage pour la baie de la Tortue, située à 12,2 milles sur l’île Ouen. Très jolie baie, nous verrons une tortue à plusieurs reprises ainsi qu’un serpent de mer. Il fait très beau, Dany fait du bronzage sur le pont et moi de la couture sur la grand voile, elle a en effet d’autres faiblesses, je crois qu’elle est en fin de vie tout simplement. 20 000 milles je pensais qu’elle ferait plus, mais ici le soleil est impitoyable. Journée tranquille qui se terminera par nos jeux du soir, d’un film et au lit comme souvent avant 9 heures. 5 novembre à 6 heures 30 on relève le mouillage. Après un essai pour passer par la passe de Nokoné, impossible avec ce soleil rasant et au milieu des patates de corail, nous faisons demi tour pour prendre le canal Woodin qui lui n’est pas au milieu des patates et loin du récif. Nous sortons du canal juste avant l’étale de pleine mer, un petit mascaret commençait à se former. Nous allons tirer des bords jusqu’à l’île des Pins avec l’aide du moteur. A 8 milles de l’îlot infernal et de son phare, le moteur s’arrête. Diagnostique du capitaine : prise d’air dans le gasoil, il tentera la réparation en pleine mer, nous avons en effet fait demi tour pour être tranquille avec de la mer devant nous pour qu’il répare. Avec la gîte et le clapot impossible de réparer. On décide de faire notre entrée en baie de Kuto à l’île des Pins, à la voile. On tire des bords toute la nuit et c’est lorsque le soleil se lève dans la baie que notre capitaine effectue le dernier virement de bord au milieu des autres voiliers et à quelques mètres seulement d’un ferry à quai. La manœuvre est parfaite, le mouillage un peu loin du rivage pour nous y rendre à la nage, qu’importe puisque pour l’instant c’est d’un copieux petit déjeuner dont nous avons besoin et de quelques heures de sommeil.
Nous irons faire de jolies balades pendant que le capitaine répare le moteur (serre câble défectueux). Visite des vestiges du bagne. Même si nous le savons bien, c’est dur de voir ce que l’homme est capable de faire subir à son prochain. C’est en 1872 que le premier convoi de déportés de la Commune de Paris débarque à l’île des Pins. Ils ont tracé des routes, élevé des bâtiments dont les ruines subsistent, ils ont construit un théâtre. Tous furent amnistiés en 1879, l’île accueillit plus de 3000 exilés de la Commune de Paris, ainsi que des Berbères algériens. Ensuite ce fut le tour des relégués : 3500 récidivistes condamnés de droit communs, jamais amnistiés dont 200 femmes. Le bagne fut supprimé en 1909 et les terres de l’administration furent remises aux tribus locales à l’exception de 275 ha constitués en réserve autochtone et fermés à l’implantation européenne pour sauver la race autochtone décimée par la maladie entre autre.
A ce jour l’île des Pins est toujours gouvernée par un Gand chef, assisté par sept petits chefs, le grand chef est aussi le maire de l’île. Le moteur réparé nous permet de nous rapprocher de la plage de la baie de Kuto, jolie baie bordée de cocotiers, le lagon offre d’incomparables tonalités vertes et bleues. Au sud de la plage par un sentier qui borde la mer nous arrivons à une petite merveille : une petite crique de sable blanc et fin, festonnée de cocotiers et de pins colonnaires, elle enserre un lagon bleu turquoise coupé en deux par un gros rocher de corail relié à la plage par un banc de sable argenté. La mer chaude et peu profonde regorge de poissons.
Dimanche 8 novembre à 7 heures, nous partons rejoindre Stéphane qui se trouve à la baie de Gadji, en charter. Il nous accueille avec sa pêche du jour, deux gros chirurgiens que nous mangerons ce midi. Nous mouillons par 1.90 m de fond dans de l’eau cristalline. A cet endroit le lagon est parsemé de gros rochers de corail sur lesquels pousse la végétation, ils sont rongés par l’eau à leur base et me font songer à de grosses assiettes pleines posées sur l’eau, splendide ! Mardi 10 novembre nous quittons ce paradis par la passe de Dumbu, à peine sortis nous pêchons un thon jaune de 12 kg, un deuxième suit qui retrouvera sa liberté au raz de la jupe. Deux heures plus tard c’est deux Bonites qui subissent le même sort. Avec une ligne de traine de chaque côté c’est deux par deux qu’ils arrivent à bord. Nous préparons les cadeaux de la coutume que nous ferons à l’arrivée à Ouvéa. Maoro file vent arrière et voiles en ciseaux, c’est au petit matin que l’on détangonne le yankee.
Nous franchissons la passe de Coetlogon et nous entrons dans le lagon d’Ouvéa, la plus au nord des îles de la Loyauté et nous mouillons à Fayaoué dans des fonds de sable blanc et trois mètres seulement sous la coque. Nous descendons à terre, sur la plage de sable fin qui s’étire sur 25 kms face au lagon turquoise. Nous allons de suite demander à rencontrer le chef de la tribu, nos poissons dans un sac, afin de faire la coutume. Nous allons vivre un moment émouvant durant cette coutume car après avoir reçu nos cadeaux : du tabac, des tissus, un billet de 1000 Cfp et une bonite, la femme du chef nous explique le pourquoi de cette coutume, qui fera l’objet d’un autre texte.
Dany prendra l’avion demain mais avant nous nous rendons dans une autre tribu, les Ouloup, chez Rosalie, qui se situe au centre de l’île, c’est là que nous allons attendre l’arrivée de Jérôme, Sébastien et Audrey, en attendant nous ramassons des coquillages, la plage en est couverte, des baignades enfin la routine quoi ! A bientôt à Ouvéa.
Lien avec l'album photos :
http://picasaweb.google.com/MaoroChantalYves/26_SejourDany#